Véhicules automatisés
État des lieux à l’international et en Suisse
La mobilité automatisée – ou largement assistée – est un thème technologique majeur, qui touche de nombreux domaines en tant qu’aspect de la transformation numérique. Les véhicules actuels, dotés d’aides à la conduite de plus en plus performantes, sont aujourd’hui déjà techniquement capables d’exécuter de manière autonome certaines tâches (niveau 3 de la norme SAE J3016 de la SAE International). C’est l’étape précédant l’automatisation élevée, où le véhicule se déplace de manière autonome de A vers B mais demeure équipé d’un volant et de pédales (niveau 4 de la norme SAE J3016). Les véhicules autonomes sans volant ni pédales (niveau 5) dont l’autonomie de conduite n’est pas limitée à des trajets définis ou à des réseaux routiers restreints, nécessitent encore des avancées considérables en termes techniques et législatifs et sont donc exclus de nos considérations.
Le passage au niveau 4 et le déploiement initial de ces véhicules font déjà l’objet de controverses. Plutôt qu’une évolution lente et progressive, il semble possible que nous assistions dans un avenir proche à des «sauts quantiques», probablement avec le déploiement de flottes de camions. Le développement de véhicules sans champ d’application restreint ne doit pas être confondu avec l’utilisation de taxis et de bus autonomes en périphérie urbaine et dans des zones urbaines délimitées. En Suisse, de petites navettes sont déjà à l’essai à faible niveau de complexité, c’est-à-dire sur des trajets et des réseaux routiers préparés, à Sion, à Fribourg et à Neuhausen; d’autres suivront. A Singapour circule toute une flotte de taxis autonomes et Waymo a obtenu la première autorisation d’opérer en Californie des taxis sans accompagnateur. Ces projets pilote posent des exigences bien moindres en termes de perception de l’environnement, d’interprétation et de capacité décisionnelle des systèmes que l’utilisation plus large et générale des véhicules au niveau 4.
La tendance à la mobilité automatisée revêt une grande importance, notamment en raison des attentes majeures et parfois peu réalistes qui s’y rattachent: meilleur taux de remplissage des routes et des véhicules, facilitation de nouveaux concepts de mobilité et modèles commerciaux, baisse des coûts surtout dans le domaine de la logistique, nouveaux modes de mobilité pour les personnes jeunes et âgées, et gains de temps grâce à l’abolition de tâches de conduite fastidieuses. La technologie génère pourtant aussi des craintes et du scepticisme, rendant vulnérable son acceptation par les utilisateurs. Il s’agit d’avancer avec prudence: la fiabilité et le degré de validation des systèmes informatisés sont mis en doute, la protection des gigantesques volumes de données générés est dépeinte comme problématique, et des questions émergent concernant la contrôlabilité, la responsabilité, et la pratique d’immatriculation. Des logiciels, des systèmes de capteurs et d’autres matériels (p.ex. de nouvelles micro- puces), qui ensemble rendent les conducteurs quasiment superflus, sont déjà en cours de développement et d’essai. Cela inclut les algorithmes nécessaires d’apprentissage automatique et de reconnaissance des formes, c’est-à-dire d’intelligence artificielle. En vue d’une introduction réussie, il s’agit d’optimiser le système complet et de l’intégrer à des concepts de mobilité d’ordre plus global, arbitrant par exemple entre les exigences de minimisation des coûts et de sécurité. La cohabitation de véhicules conduits par des humains et de véhicules automatisés présente des difficultés à ne pas sous-estimer; il s’agit entre autres de régler des questions d’immatriculation.
Implications pour la Suisse
Les systèmes automatisés sont un axe central de recherche et de développement à l’EPFL et à l’ETH Zurich, dans différentes hautes écoles spécialisées et chez des constructeurs automobiles de premier plan et de grands équipementiers. De plus en plus de PME innovantes s’y consacrent également. La Suisse, pays hautement développé à forte densité de circulation, tirera des bénéfices de systèmes de transport automatisés/autonomes pour les personnes et les marchandises. Elle est par ailleurs bien positionnée pour participer activement à leur expérimentation et à leur introduction. Même si la Suisse ne dispose pas d’une industrie automobile propre, son savoir-faire spécialisé et ses performances avérées en la matière ouvrent de nouveaux champs d’action et de nouvelles opportunités commerciales à l’industrie de la sous-traitance automobile, aux grandes entreprises (logistique, transport de personnes et de marchandises, assurances) et aux PME (technologie des capteurs, développement de systèmes et de logiciels).